La résidence sise au 125-127, rue Saint-Charles aurait été construite vers 1868 pour Charles-Joseph Laberge qui est alors maire de Saint-Jean. Laberge quitte ensuite la ville pour Montréal afin de diriger le journal Le National, et il vend sa propriété au marchand Arcade Decelles. Decelles devient, par la suite, conseiller municipal puis maire de Saint-Jean entre 1877 et 1879. Laberge fait construire un premier corps de logis qui est agrandi quelques années plus tard par Decelles. Par son plan irrégulier et ses dentelles de bois, la résidence Laberge / Decelles s’inscrit dans le courant pittoresque. Elle se compose d’un corps de logis à deux étages et demi dont le plan forme un « L », d’une haute toiture à deux versants droits, d’une galerie et d’un balcon.

La propriété de la rue Saint-Charles conserve tous ses éléments originaux et aucun volume n’a été ajouté ce qui lui confère une excellente intégrité matérielle et formelle. Elle possède une structure de brique rouge-orangé laissée apparente qui compte quatre rangs d’épaisseur. Cette technique constructive disparaît à la fin du XIXe siècle, et elle se remarque à l’insertion de rangs de briques posées en boutisse dans l’appareillage. La maison repose sur un solage de pierre. La porte double à panneaux surmontée d’impostes ainsi que les fenêtres à battants ont été préservées. La résidence compte quatre hautes souches de cheminées décorées et disposées aux extrémités de la toiture recouverte de tôle pincée. Le programme décoratif des cottages pittoresques puise à divers courants et est habituellement assez élaboré. D’élégantes dentelles de bois ornent les rives de la toiture. Ce type d’ornement se retrouve fréquemment sur les cottages d’inspiration néogothique. Le programme comprend également des linteaux de pierre au-dessus des ouvertures qui ont une fonction structurale. La galerie compte une frise, des aisseliers et un garde-corps aux balustres tournés.

La maison Laberge / Decelles possède une valeur patrimoniale élevée. Elle constitue un bon exemple de cottage pittoresque dans le secteur de Saint-Jean. Ce type d’habitation est diffusé au Québec à partir de catalogues de plans étasuniens. La demeure se trouve dans un parfait état en ce qui a trait à son authenticité matérielle. Elle conserve ses éléments distinctifs comme sa structure de brique et ses dentelles de bois.